PÉTROLE ET INDÉPENDANCE NATIONALE : D’ENRICO MATTEI À CHRISTOPHE DE MARGERIE
Extrait du site de l’AFP, le 21 octobre 2014 à 11 heures 29 :
« LA MORT DU PATRON DE TOTAL DÉCAPITE LA PLUS GRANDE ENTREPRISE FRANÇAISE
« Le PDG de Total Christophe de Margerie est décédé dans la nuit de lundi à mardi à 63 ans dans un accident d'avion en Russie : les hommages affluaient après cette perte brutale d'un grand patron très charismatique, qui décapite la plus grande entreprise française. Le patron du géant pétrolier, première entreprise française par les bénéfices et deuxième par la capitalisation boursière derrière Sanofi, a été tué dans la nuit de lundi à mardi dans le crash d'un avion privé entré en collision avec une déneigeuse alors qu'il s'apprêtait à décoller de l'aéroport de Vnoukovo, près de Moscou. L'appareil s'est écrasé peu avant minuit (heure locale) en provoquant la mort de la totalité de ses quatre occupants, dont trois membres d'équipage. Selon le comité d'enquête russe, le conducteur de la déneigeuse était "en état d'ivresse" au moment de l'accident. De son côté, le Bureau français d'enquêtes et d'analyses (BEA) pour la sécurité de l'aviation civile va dépêcher trois enquêteurs à Moscou dans la journée pour tenter d'éclaircir les conditions de l'accident de l'avion, un Falcon 50 exploité par la compagnie Unijet. L'action Total perdait 1,49% à 42,30 euros peu après l'ouverture de la Bourse de Paris.
(…) Une enquête sur les circonstances de l'accident a été ouverte auprès du Comité intergouvernemental d'aviation, qui enquête sur tous les accidents aériens en Russie, ainsi qu'auprès de l'agence fédérale d'aviation russe, dont le directeur, Alexandre Neradko, a promis de suivre le dossier personnellement.
Selon le quotidien russe Vedomosti, Christophe de Margerie revenait d'une réunion avec le Premier ministre russe Dmitri Medvedev consacrée aux investissements étrangers en Russie au moment où les sanctions américaines et européennes décrétées dans la foulée de la crise ukrainienne frappent durement Moscou. Bénéficiant de bons contacts au sommet de l'Etat russe, le patron faisait partie des hommes d'affaires français qui prônent l'investissement en Russie, un pays important dans la stratégie du groupe qui ambitionne d'en faire sa principale zone de production d'hydrocarbures à l'horizon 2020. Total est partenaire avec le russe Novatek dans le gigantesque projet gazier Yamal, dans le Grand Nord russe. (…). »
Le commentaire de ForumSi :
PÉTROLE ET INDÉPENDANCE NATIONALE : D’ENRICO MATTEI À CHRISTOPHE DE MARGERIE
En 1962, mourait Enrico Mattei, patron de l’ENI, le grand goupe pétrolier italien, dans un accident d’avion mystérieux, vraisemblablement causé par une bombe embarquée. Ancien partisan, Mattei avait, contre toute attente, poursuivi l’oeuvre du fascisme pour doter l’Italie d’un outil propre à assurer son indépendance énergétique. Cela ne lui fut certainement pas pardonné par les monopoles anglo-saxons du pétrole, qui pouvaient légitimement s’attendre à en avoir fini avec toute velléité d’indépendance énergétique italienne en en ayant fini avec le fascisme. En persistant dans son projet industriel, Mattei avait donc signé son arrêt de mort...
Est-on en face d’une affaire du même type avec la disparition, en même temps que ses trois compagnons de vol, de Christophe de Margerie ? On est en droit de se poser la question. En effet, ce personnage atypique et charismatique à sa façon n’était pas seulement d’une remarquable clarté dès lors qu’il s’agissait de parler de la politique énergétique de la France. Il menait aussi, à la tête de cet énorme groupe qu’il avait fait de Total, une politique totalement non conformiste, ayant noué des relations de confiance, non seulement avec la Russie, ce qui était certainement mal vu par les gnomes de Wall Street, mais également avec l’Iran, ce qui n’était certainement pas du goût de ceux de Tel Aviv.
Comme Mattei, Margerie s’était donc fait des ennemis puissants. Doit-on chercher là l’origine de sa mort, une mort que l’on présente comme accidentelle, puisque, nous dit-on, il y avait un engin d’entretien qui traînait sur la piste moscovite au moment où l’avion du patron de Total l’empruntait pour décoller ? On avouera que la présence de cet engin au mauvais endroit et à un mauvais moment soulève bien des questions : l’enquête des autorités russes et des envoyés français permettra-t-elle d’en savoir plus ?