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IL Y A QUATRE-VINGT-TROIS ANS : LE 6 FÉVRIER 1934 ET L’OCCASION MANQUÉE DU 7 FÉVRIER

5 Février 2017 , Rédigé par forumsi Publié dans #La France aux Français !

IL Y A QUATRE-VINGT-TROIS ANS : LE 6 FÉVRIER 1934 ET L’OCCASION MANQUÉE DU 7 FÉVRIER

Le 6 février 1934, à l’appel d’organisations et ligues patriotiques et nationalistes (Union nationale des combattants, Action française, Jeunesses patriotes, Croix-de-Feu, etc.), se déroulait une grande journée de manifestations destinées à protester contre la politique du ministère Daladier, à la suite de l’affaire Stavisky et de la mutation du préfet de police Jean Chiappe. Des heurts sanglants eurent lieu avec la police et la Garde républicaine, chargées de défendre la Chambre des députés : il y eut 14 tués et l’on signalera que, de tous les mouvements organisateurs de la journée de manifestations, l’Action française fut celui qui compta le plus grand nombre de morts, ce qui en dit long sur le degré de combativité de ce grand mouvement nationaliste français, que l’historien allemand Ernst Nolte considère comme le premier en date des mouvements fascistes européens.

 

Le lendemain, 7 février, Edouard Daladier démissionna et fut remplacé, le 9 février, par Gaston Doumergue (plaisamment rebaptisé « Merguedou » par Léon Daudet, polémiste redoutable et l’un des dirigeants les plus énergiques de l’Action française, lequel pratiqua donc le verlan bien avant qu’il ne fût à la mode). Les événements de la journée du 6 février contribuèrent à unir la gauche, qui organisa, le 9 février également, une contre-manifestation suivie, trois jours plus tard, d’une grève générale. Les historiens considèrent que cette réaction unitaire de la gauche constitua le premier acte d’un ensemble d’événements qui devaient mener à la formation du Front populaire de 1936. Les Camelots du roi et étudiants d’Action française qui avaient mené, durant les semaines précédant le 6 février, des manifestations incessantes pour dénoncer la corruption du monde politique républicain une nouvelle fois mise à jour -cette fois-ci par le scandale Stavisky- ne recherchaient certainement pas cet aboutissement de 1936. On ne manquera d’ailleurs pas de souligner que leur mouvement insurrectionnel était parfaitement légitime puisque, face à un large phénomène de corruption totalement avéré, les responsables républicains, plutôt que de faire toute la lumière et d’entamer un nécessaire grand nettoyage de la classe dirigeante, ne cherchaient qu’à masquer leurs responsabilités (l’affaire Stavisky comporte, bien évidemment, le lot habituel de soi-disant « suicides » et de manœuvres diverses, plus tordues les unes que les autres) et, comme d’habitude, à préserver leurs juteux fromages.

 

DE « L’AUBE DU FASCISME » QUI NE S’EST PAS LEVÉE EN FRANCE À L’EXÉCUTION DE ROBERT BRASILLACH, IL Y A SOIXANTE-ET-ONZE ANS

 

Face à une telle mauvaise foi, le devoir d’insurrection était évident, puisqu’aucune autre voie n’était ouverte pour remettre de l’ordre dans notre infortuné pays. Normalement, l’Action française aurait dû profiter de l’émeute du 6 février 1934 pour prendre le pouvoir, en alliance avec les autres mouvements ayant appelé à manifester, ce d’autant plus que Charles Maurras avait, au début du siècle dernier, théorisé cette situation dans un texte retentissant intitulé « Si le Coup de force est possible ». Il semble que cette idée d’un coup de force ait habité certains dirigeants de l’Action française, Léon Daudet en particulier, en février 1934. Leurs réflexions étaient même allées assez loin ; il semble ainsi que l’une des solutions envisagées ait été que le mouvement insurrectionnel lancé par les Camelots du roi débouchât sur une remise du pouvoir au maréchal Lyautey, grande figure militaire française unanimement respectée, mais aussi farouche nationaliste (en même temps que très ouvert à l’idée de la nécessaire solidarité européenne) proche de l’Action française (tout en se rattachant plutôt au monarchisme légitimiste ; nous citons de mémoire cette solution éventuelle d’un appel à Lyautey, n’ayant pu, en effet, retrouver la documentation qui la mentionne).

 

Malheureusement, il semble que Maurras n’ait pas cru que « le coup de force » fût « possible » à ce moment-là ; il ne donna donc pas les ordres qui auraient permis à l’insurrection nationaliste de l’emporter et les sacrifices du 6 février 1934 se traduisirent par un résultat misérable : la constitution du cabinet « Merguedou », en attendant celle du Front populaire. « L’aube du fascisme se lève en France », titrait le Völkischer Beobachter au lendemain du 6 février 1934 : la suite des événements devait montrer que l’organe de la NSDAP se trompait, et lourdement ! Il reste que le Six-Février a représenté un événement majeur pour notre camp : nous examinons plus bas comment tout aurait pu basculer le lendemain, 7 février 1934.

 

Onze années plus tard, le 6 février 1945, était fusillé l’un de ceux qui avaient soutenu le plus ardemment les émeutes de 1934, l’écrivain et poète Robert Brasillach, qui avait longtemps écrit dans L’Action française avant de prendre la direction de l’hebdomadaire fasciste Je suis Partout. Dans ses remarquables mémoires, publiés sous le titre « A l’Epreuve du temps », Jacques Benoist-Méchin, qui était emprisonné en même temps que Brasillach et avait réussi à communiquer assez régulièrement avec celui-ci, raconte comment il a vu, pendant cette période de détention commune, s’affirmer et mûrir le talent de Brasillach poète. Aussi, qui mieux que ce dernier pouvait donc saluer la mémoire des morts du 6 février 1934, ces morts qu’il allait rejoindre le même jour, à onze ans d’intervalle :

 

« Les derniers coups de feu continuent de briller

« Dans ce jour indistinct où sont tombés les nôtres

« Sur onze ans de retard serais-je donc des vôtres

« Je pense à vous ce soir, ô morts de février ».

 

L’OCCASION MANQUÉE DU 7 FÉVRIER 1934

 

Pour justifier notre opinion selon laquelle la journée du 7 février a été celle d’une occasion manquée de la prise du pouvoir par les nationalistes, nous nous reporterons à l’ouvrage très inégal, mais très fouillé, consacré par l’historien américain Eugen Weber à l’Action française. Celui-ci donne, en ce qui concerne cette journée du 7 février, des faits et indications d’ « ambiance » dont on retiendra essentiellement ce qui suit :

 

-en début de journée, « on savait que les émeutiers se préparaient à revenir. Et cette fois, l’émeute serait mieux armée (…) en face d’une police et de la garde qui avaient subi de lourdes pertes, dont le moral était bas. (…) » ; l’atmosphère était d’autant plus électrique que Léon Daudet avait publié un article extrêmement violent à propos des événements du 6, comme l’extrait suivant permettra d’en juger : « Un gouvernement de crapules innommables (…), (un) gouvernement de filles et de gredins a fait tirer sur le peuple de Paris, tirer à la mitrailleuse, sauvagement ! » ;

 

-toutefois, « dans un dernier sursaut défensif, la police, sous la direction de Frot, avait donné l’ordre d’arrêter préventivement plusieurs chefs nationalistes, parmi lesquels ceux de l’Action française. La police rata Pujo (…), Daudet refusa d’obtempérer en l’absence d’un mandat d’amener (…). La porte de Maurras restait close (…) » ;

 

-l’échec des arrestations prévues laissait donc intacte la possibilité de reprendre les manifestations et d’aller, cette fois-ci, jusqu’à la prise du pouvoir ; malheureusement, tout allait basculer au milieu de cette journée décisive du 7 février ; vers l’heure du déjeuner, en effet, Daladier, président du Conseil, « se décidait à partir et la nouvelle en parvint au public vers trois heures de l’après-midi, accompagnée de l’information que l’ancien président Doumergue (…) s’était engagé à former le nouveau gouvernement ».

 

Que s’était-il donc passé entre minuit et midi ? Qu’avaient donc fait les nationalistes pendant ces heures où l’on pouvait croire que la lutte allait reprendre, pour connaître, cette fois-ci, une issue victorieuse ? Pour en avoir une idée, reportons-nous à nouveau à « L’Action française » d’Eugen Weber, dont on retiendra ici les éléments suivants :

 

-Pierre Lecoeur, l’un des dirigeants de la Ligue d’Action française, « avait appris de diverses sources (…) que la Garde et la police, exaspérées par les événements de la veille, aussi bien contre l’autorité que contre la foule, avaient mauvais moral » ;

 

-la situation était donc particulièrement favorable et, « sur le boulevard, entre l’Opéra et la place de la Concorde, il y avait foule, une foule qui attendait quelque chose et on avait proposé que Daudet la rameutât devant l’Opéra pour la conduire jusqu’à l’Elysée » ;

 

-malheureusement, « les leaders palabrèrent, (et) (…) aucun ne parut faire prévaloir son opinion. (…) Le temps passait. Soudain, ce fut l’édition spéciale criée dans la rue. Doumergue prenait le ministère ».

 

L’ACTION FRANÇAISE : 800 000 EXEMPLAIRES LE 12 FÉVRIER 1934 !

 

Dès lors, les choses allaient s’enchaîner pour aller dans une direction qui n’était certes pas celle souhaitée par les nationalistes :

 

-« Le 12 février (…), les communistes (…) organisèrent (…) une démonstration (…) ‘’contre le péril fasciste’’. (Leur défilé et celui organisé le même jour par les socialistes) se confondirent en un seul, exprimant l’opposition de la classe ouvrière et de la gauche non conservatrice en général au triomphe apparent de la droite » ;

 

-« Une grève largement obéie, (…) le même jour, prouvait la possibilité, pour les syndicats, d’agir efficacement quand on le voulait ».

 

Le processus de Front populaire était en route ! Mais la puissance du courant nationaliste restait toutefois impressionnante, comme en témoigne cette précision de l’historien américain :

 

« L’Action française (…) était bien placée pour (…) savoir (que cette grève était une réussite), car son journal fut le seul à paraître ce jour-là dans Paris. Imprimée dans une maison non syndiquée, distribuée par les Camelots, L’Action française s’enleva comme jamais : deux éditions et huit cent mille exemplaires, prétendit-on ».

 

800 000 exemplaires ! Quand on atteint un tirage aussi démentiel, probablement le plus important de la presse de l’époque, quand, de surcroît, la police est démoralisée, on prend le pouvoir ! Comment se fait-il que les nationalistes, et l’Action française en particulier, aient pu laisser passer une telle occasion ? Nous avons déjà noté que Maurras qui, vraisemblablement, n’y croyait pas, était resté en retrait, ce qui était une erreur colossale, car il jouissait à l’époque d’une considérable renommée. Mais il n’était pas seul et d’autres auraient pu donner l’impulsion nécessaire à un « coup de force » qui, à l’évidence, était « possible »…Eugen Weber ne donne malheureusement pas le nom des « leaders » nationalistes qui « palabraient » et ne parvinrent pas à se mettre d’accord sur la marche à suivre, laissant ainsi passer une occasion rarissime !

 

Ce qui est aujourd’hui évident, toutefois, c’est que les « leaders » en question n’étaient pas de ceux qui pouvaient prendre une décision radicale et entraîner la rue nationaliste à donner l’ultime coup de boutoir pour abattre la République des voleurs…A cet égard, il est regrettable qu’un homme énergique et extrêmement populaire comme Léon Daudet n’ait visiblement pas participé aux discussions du 7 février au matin, alors qu’il aurait pu emporter la décision et qu’il avait à sa disposition, avec ce courageux combattant qu’était Maxime Réal del Sarte (nous ignorons si cet autre combattants valeureux qu’était Joseph Darnand était encore à l’AF à l’époque) et ses Camelots du roi (composés de militants déterminés, tels le polytechnicien Eugène Deloncle ou le redoutable Jean Filliol), la troupe d’élite nécessaire pour encadrer une foule qui n’attendait que ça et était prête à la lutte finale contre un régime à l’agonie, que sa police démoralisée n’eût certainement défendu que très mollement…Qui plus est, Léon Daudet avait la carrure nécessaire pour faire un excellent président du Conseil et diriger le Comité de salut public qu’il eût fallu mettre en place pour préserver les acquis de ce « coup de force » qui, répétons-le, était « possible ».

 

IL N’Y A PAS DE « MALÉDICTION » : UN SIX-FÉVRIER RÉUSSI EST POSSIBLE !

 

Si l’on veut comprendre les raisons de l’échec du Six-Février, ce sont donc les discussions de la matinée du 7 février 1934 entre certains dirigeants nationalistes qu’il convient d’analyser, de façon que les conditions ayant engendré un tel échec ne puissent se reproduire. On admettra qu’il s’agit là d’un objectif à ne pas perdre de vue, d’autant plus que le souvenir du Six-Février 34 et des leçons à en tirer est toujours présent dans les mémoires et les réflexions des nationalistes d’aujourd’hui, comme l’ont montré, par exemple, les discussions qui se sont développées, sur ce thème, lors de la présentation par Gabriele Adinolfi de l’un de ses derniers ouvrages en français, « Années de plomb et Semelles de vent », le 16 décembre 2014 à l’Espace Iéna. Nous rappellerons à ce sujet ce que nous écrivions dans notre article du 17 décembre 2014, consacré à un compte rendu de cette présentation de l’Espace Iéna, où se pressaient anciens d’Occident et d’Ordre nouveau, militants éclairés du Front national et nationalistes pour le moment inorganisés, mais avides de tirer les leçons du passé en vue de la construction d’un avenir victorieux :

 

1-Si une occasion a été manquée, ce n’est pas le 6, mais le 7 février 1934, alors que la police avait assez clairement laissé entendre qu’elle n’était pas prête à reprendre les fusillades pour défendre, comme la veille, un gouvernement et une République totalement discrédités. Malheureusement, les nationalistes ne surent pas saisir cette chance du Sept-Février et la République sauva sa tête…Il suffisait pourtant de très peu de choses, par exemple qu’un homme énergique comme Léon Daudet participât aux discussions entre dirigeants nationalistes du 7 février au matin : il aurait certainement emporté l’adhésion des participants, les manifestations auraient repris et, sous les coups de boutoir de Camelots du roi déchaînés par la mort de leurs camarades, la République honnie aurait été renversée et remplacée par un Comité de Salut public.

 

2-Comme le montre cet exemple, nulle malédiction ne frappe la droite nationaliste depuis l’échec de Boulanger. Il suffit qu’elle sache profiter des événements en frappant fort, au bon moment. Pour cela, il faut qu’existe une robuste communauté militante d’hommes adhérant avec ferveur à une même vision du monde et à un même projet politique. C’est ce qu’était un mouvement comme l’Action française en 1934, malgré ces deux boulets que représentaient, d’une part, une adhésion toute théorique à l’idée monarchique et, d’autre part, une référence « politique » au christianisme sous sa forme catholique. C’est un mouvement comme celui-là qui nous manque aujourd’hui, étant précisé que l’on n’est pas obligé, bien sûr, de traîner les mêmes boulets que l’AF des années Trente…

 

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