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IL Y A QUATRE-VINGT-DIX-SEPT ANS, LA MARCHE SUR ROME : « COMBATTERE E VINCERE! »

28 Octobre 2019 , Rédigé par forumsi Publié dans #Casapound

IL Y A QUATRE-VINGT-DIX-SEPT ANS, LA MARCHE SUR ROME : « COMBATTERE E VINCERE! »

Le 28 octobre 1922, des dizaines de milliers de Chemises noires du Partito Nazionale Fascista (PNF) marchaient sur Rome, en provenance de diverses régions italiennes. Dans sa très discutable « Italie de Mussolini », Max Gallo décrit ces militants fascistes avec un certain romantisme : « Les jeunes gens à barbiche taillée en pointe, à la Balbo, les casques peints en rouge, une tête de mort brodée sur leur chemise noire, le poignard passé dans une large ceinture de cuir, chantent sous la pluie ».

 

Deux jours plus tard, leur chef, Benito Mussolini, était nommé président du Conseil et pouvait fêter sa victoire avec les principaux dirigeants de la Marche, surnommés les « quadriumvirs » : le flamboyant « squadrista » Italo Balbo, le général Emilio De Bono, le syndicaliste révolutionnaire  Michele Bianchi et l’avocat Cesare Maria De Vecchi.

 

DE L’INTERVENTIONNISME DE GAUCHE AU FASCISME

 

Ancien dirigeant du Parti socialiste italien et ancien rédacteur en chef de l’Avanti, le quotidien du Parti, Mussolini avait mené, alors qu’il était encore membre de celui-ci, une vigoureuse campagne en faveur de l’intervention de l’Italie aux côtés des Alliés pendant la Première Guerre mondiale, campagne qui amena son exclusion du Parti socialiste italien. Cette campagne « interventionniste » du futur Duce du fascisme résulta d’une évolution de son analyse de la situation, évolution que l’on peut résumer de la façon suivante :

 

-au début de la guerre, Mussolini, en homme de gauche convaincu, est hostile à l’intervention, par pacifisme ;

 

-puis, progressivement, il se rend compte que, en restant en dehors du conflit, l’Italie risque de passer à côté de l’Histoire, qui se fera sans elle (il refera, notons-le, un raisonnement du même type en 1940) ; par ailleurs, des terres italiennes, les terres « irrédentes », sont encore sous domination austro-hongroise, qu’une intervention italienne dans la guerre pourrait ramener dans le giron de la mère-patrie ; enfin, et l’on se trouve là en face d’un raisonnement de type léniniste, la guerre peut engendrer de profonds bouleversements sociaux et favoriser cette Révolution que Mussolini appelle de ses vœux (de ce qui est un mal aux yeux de ce pacifiste peut sortir un bien : la révolution sociale) ;

 

-ces trois considérations (où la dernière n’est qu’une conséquence mécanique des deux premières) vont amener ce dernier à opter, finalement, pour l’intervention aux côtés des Alliés ; on notera que Mussolini obéit ici à des motifs à la fois nationaux (éviter la marginalisation de l’Italie et récupérer les terres irrédentes) et sociaux (œuvrer pour la Révolution), dont l’alliance, légitimée par une démarche idéologique originale, sera, à l’avenir, la marque de fabrique du fascisme.

 

Le Duce finit par incarner et réaliser une synthèse des aspirations socialistes, syndicalistes révolutionnaires, nationalistes et futuristes (ces deux dernières étant respectivement théorisées par Enrico Corradini et Filippo Tommaso Marinetti), auxquelles s’ajoutèrent celles des combattants -les « arditi » en particulier, ainsi que les « légionnaires » du poète Gabriele D’Annunzio- d’où émergea ce mouvement  politique, économique, social et culturel très particulier qu’est le fascisme. Avec lui naissait ce qui, avec le bolchevisme, devait être la grande révolution du XXème siècle.

 

Le fascisme apparaît ainsi, à l’origine, comme un mouvement de gauche directement issu du socialisme italien et dans le développement duquel la France joua, à l’origine, un rôle qui fut loin d’être négligeable. Qu’on en juge.

 

MUSSOLINI ET LE SOCIALISME, MUSSOLINI ET LA FRANCE

 

Jeune agitateur socialiste avant la Première Guerre mondiale, Mussolini eut à plusieurs reprises maille à partir avec les autorités italiennes, ce qui l’obligea parfois à s’exiler temporairement. Dans l’ouvrage qu’il lui a consacré (« Mussolini », chez Fayard), l’historien Pierre Milza note que le futur Duce fut ainsi conduit, à deux reprises si nos souvenirs sont bons, à se réfugier en France, où il reçut l’aide des socialistes français, avec lesquels il noua des relations. Celles-ci devaient avoir des conséquences politiques et financières importantes puisque, lorsque, en 1915, il se lança (voir plus haut) dans sa campagne pour l’intervention de l’Italie dans la Guerre aux côtés de la France et de la Grande-Bretagne, Mussolini reçut un soutien appuyé de la part de ces mêmes socialistes français qui, engagés dans la politique dite de l’« Union sacrée », allèrent jusqu’à aider au financement du quotidien que le leader de l’interventionnisme de gauche allait lancer pour soutenir sa campagne : Il Popolo d’Italia (ce financement est également attesté par l’ouvrage de Milza).

 

Or, Il Popolo d’Italia devait devenir, après la Guerre, l’organe central des Faisceaux de combat, lesquels devaient ensuite donner naissance au Partito Nazionale Fascista. On peut donc affirmer sans exagération que ce sont des capitaux français, rassemblés par les socialistes français (avec l’aide, précisons-le du gouvernement français), qui ont permis le lancement d’un quotidien qui allait devenir l’organe officiel du fascisme italien ! Et ces relations étroites devaient connaître d’autres illustrations, par exemple celle-ci, que l’on trouve également dans le livre de Pierre Milza (que nous citons ici de mémoire) : en août 1922, soit quelques semaines avant la Marche sur Rome, Mussolini se rendit dans le sud de la France (à Cannes ?), afin de couvrir une conférence internationale pour le compte du Popolo d’Italia ; inutile de dire que Mussolini, déjà considéré comme une figure centrale de la politique européenne, arracha la vedette aux conférenciers, qui profita de sa présence en France pour rejoindre Paris et aller se recueillir, au Café du Croissant, à l’endroit où Jean Jaurès avait été assassiné. Comment mieux dire que le fondateur du fascisme continuait à revendiquer ainsi sa filiation socialiste, lui qui, peu avant son assassinat, en avril 1945, recevait une journaliste allemande à laquelle il déclarait : « Au fond, je suis resté un vieux socialiste ».

 

Ce qui ne veut pas dire, bien évidemment, que les relations ne se dégradèrent pas entre ce socialisme national qu’était le fascisme, d’une part, et, d’autre part, le socialisme italien d’obédience marxiste et anti-interventionniste. Comme l’on sait, la confrontation fut parfois extrêmement violente, même si, peu après la Marche sur Rome, Mussolini tenta d’organiser les relations entre fascisme et socialisme sur une base constructive, tentative qui fut brisée par l’assassinat (par des éléments réactionnaires ralliés au gouvernement du Duce ?), en juin 1924, du député socialiste Matteotti. Mais, s’il était définitivement brouillé avec les socialistes italiens, Mussolini n’en continua pas moins à adopter, à l’égard de la France, une attitude amicale, dans le prolongement des liens tissés, avant-guerre, avec les socialistes français. C’est ainsi que, nouveau président du Conseil après la marche sur Rome, il soutint durablement et sans hésitation l’occupation de la Ruhr par la France en janvier 1923, qui avait pour objectif de faire pression sur l’Allemagne pour obtenir le respect par celle-ci des clauses financières du Traité de Versailles.

 

Beaucoup plus tard, en octobre 1935, Mussolini engagera l’Italie dans la guerre d’Ethiopie, en pensant avoir pour cela l’accord tacite de la France, sur la base d’une conversation qu’il avait eue, en janvier 1935, avec Pierre Laval, alors ministre des Affaires étrangères de notre pays. Toutefois, la politique dite des « sanctions » contre l’intervention italienne, mise en œuvre par une SDN sous influence britannique et appuyée par la France, vint totalement bouleverser les choses et jeta un voile sur le climat de confiance qui, jusqu’alors, avaient globalement caractérisé les relations entre la France et l’Italie fasciste. Mussolini, toutefois, cherchera à en reprendre le cours, immédiatement après la fin de la guerre d’Ethiopie, en mai 1936. Le gouvernement de Front populaire venait d’arriver au pouvoir en France et, dans sa magistrale Histoire de l’Armée allemande, Benoist-Méchin indique que le Duce adressa alors à Léon Blum, nouveau président du Conseil en France, une lettre lui proposant de reprendre les relations confiantes qui prévalaient avant la guerre d’Ethiopie.

 

Prisonnier de son sectarisme antifasciste, Blum ne daigna pas répondre au courrier de Mussolini, lequel ne pouvait plus, dès lors, que s’engager un peu plus en direction de l’alliance allemande, avec toutes les conséquences que cela pouvait avoir sur la rupture des équilibres européens. On peut imaginer, en effet, que les développements ayant conduit à la Seconde Guerre mondiale n’auraient pas forcément été ce qu’ils furent si l’Italie ne s’était pas liée au Reich comme elle finit par le faire : en ayant refusé de reprendre des relations de confiance avec l’Italie, Blum porte, pour une lourde partie, la responsabilité des développements qui, ultérieurement, conduisirent au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Un déclenchement que, comme le note Benoist-Méchin, Mussolini fit tout son possible pour éviter (tout comme Göring, d’ailleurs, qu’effrayait la perspective d’une nouvelle guerre entre Européens), multipliant, y compris après le déclenchement de l’offensive allemande en Pologne, le 1er septembre 1939, les initiatives pour parvenir à la réunion d’une conférence de Munich-bis. On retiendra, en tout cas, que, s’il y eut finalement rupture entre la France et l’Italie, ce ne fut certes pas du fait de Mussolini.

 

L’ACTION FRANÇAISE, NOTRE FASCISME : QUAND LÉON DAUDET PENSAIT À UNE « MARCHE SUR PARIS »

 

La Marche sur Rome eut un retentissement considérable à l’extérieur de l’Italie (elle inspira, par exemple, le putsch de novembre 1923 à Munich), et en particulier chez les maurrassiens français, qui savaient quelles convergences idéologiques pouvaient exister entre le fascisme et le nationalisme intégral. Dans son ouvrage -très inégal- sur l’Action française, l’historien américain Eugen Weber donne à ce sujet les précisions suivantes :

 

« Les observateurs amicaux ou hostiles notaient les ressemblances entre les nationalistes intégraux et les fascistes. Les membres de l’Action française espéraient que Daudet prendrait le pouvoir à Paris de la même façon que Mussolini à Rome ; les commentateurs de province dénonçaient le danger d’un coup de force royaliste. Le Populaire de Nantes déplorait [NDR : le 2 novembre 1922], la forte position de Daudet avec toute la puissance de l’Action française derrière lui. Il fallait compter avec lui, qui, un jour ou l’autre, encouragé par la victoire de Mussolini, tenterait un coup d’Etat.

 

« Dix jours plus tard, une souscription comprenait vingt francs envoyés par un artilleur qui assurait ‘’qu’il aimerait aider l’Action française à atteindre le même but que le Fascio’’.

 

« Il semble que Daudet lui-même ait eu la même idée. Il reçut un accueil enthousiaste d’un public d’étudiants en affirmant à propos de Mussolini que l’Action française, elle aussi, s’emparerait du pouvoir (…). (Ce qui) ne serait pas le résultat d’une inspiration fasciste pour autant, mais le résultat de la doctrine d’Action française existant depuis longtemps. ‘’Nous n’imitons personne, expliquait Daudet avec un rien d’amertume, nous ne sommes le résultat d’aucun autre mouvement, pas même du fascisme italien contemporain ou passé’’. »

 

On sait que les espoirs de Léon Daudet ne se réalisèrent pas, pour des raisons que nous n’analyserons pas ici. Il reste néanmoins que la Marche sur Rome représenta, pour l’Europe, un grand coup de vent salutaire que tous les Européens doivent fêter avec reconnaissance, en s’écriant, comme on pouvait le faire à l’époque : « Viva la rivoluzione delle Camicie nere » !

 

LA MARCHE SUR ROME : UNE AUTHENTIQUE RÉVOLUTION

 

« Vive la révolution des Chemises noires ! », en effet, car il s’agissait bel et bien d’une révolution, contrairement à ce que veut nous faire croire l’histoire officielle distillée par les gras médias, qui laissent entendre que la Marche sur Rome n’était que l’habillage héroïque d’un accord secret entre le roi Victor-Emmanuel III et Mussolini, au terme duquel ce dernier devait accéder au poste de président du Conseil.

 

Or, rien n’est plus faux. Ayant participé à un colloque réuni à l’occasion du quatre-vingt-dixième anniversaire de la Marche, Gabriele Adinolfi signalait que celle-ci s’était traduite par de nombreux accrochages entre les militants fascistes et les forces de l’ordre, ce qui est bien la preuve qu’aucun accord n’existait entre le Roi et le Duce. Le roi d’Italie, en effet, n’avait nullement l’intention de remettre le pouvoir à Mussolini, qui, de par sa formation socialiste, était d’ailleurs foncièrement républicain et n’avait certainement pas le projet de soutenir la monarchie branlante de la maison de Savoie.

 

On trouvera une confirmation des tensions de l’époque dans cette information, toujours donnée lors du colloque de 2012, que plusieurs dizaines de fascistes armés, dirigés par un homme particulièrement énergique, Ettore Muti, s’étaient installés clandestinement à Rome, où ils devaient, si nécessaire, intervenir pour prendre à revers les forces de l’ordre, au cas où celles-ci auraient tenté de s’opposer à l’entrée des Chemises noires dans la Ville éternelle.

 

Peu confiant dans les soutiens dont il pouvait disposer, en particulier au sein de l’armée italienne, le Roi renonça finalement à s’opposer à Mussolini, qui fut nommé président du Conseil. En contrepartie, ce dernier renonça à abolir la monarchie, avec laquelle il ne rompit qu’en 1943, après sa destitution et lors de la fondation de la République sociale italienne.                   

 

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PS : chaque année, l’anniversaire de la Marche donnera lieu, en Italie, à d’importantes manifestations commémoratives, comme ce discours prononcé par Mussolini à l’occasion du Xème anniversaire, dont nos lecteurs trouveront, ci-dessous, une vidéo.

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