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APRÈS LA LIBYE, LA SYRIE ? M. ARAUD, C’EST VOUS QUI ÊTES «CREUX» ET «DÉSÉQUILIBRÉ» !

3 Janvier 2012 , Rédigé par forumsi Publié dans #Après la Libye - à qui le tour

Gérard Araud

 

L’article dont les extraits sont publiés ci-dessous date déjà d’une quinzaine de jours, mais il est tellement emblématique de la stupidité d’une certaine diplomatie « française » qu’il nous a semblé indispensable de le commenter, même avec un certain retard.  

 

 

Extrait du Figaro daté des 17 et 18 décembre 2011 :

 

« POURQUOI MOSCOU DURCIT LE TON CONTRE LA SYRIE

 

« En dévoilant jeudi soir un projet de résolution à l’ONU condamnant la répression en Syrie, (…) Moscou tente de préserver ses intérêts dans le pays et dans la région. (…).

« La description ‘effroyable’ des violences infligées à la population syrienne avait suscité l’indignation des membres du Conseil (de sécurité), dont celle de l’ambassadeur français, Gérard Araud.

 

« La Russie fournit de longue date des armes à la Syrie, qui demeure son principal allié dans la région. (…). Selon (un diplomate occidental), la volonté des Russes de préserver leur influence, mise à mal dans une région balayée par les révolutions arabes, explique (…) cette prise de distance inédite avec Bachar el-Assad.

 

« Depuis le début des révoltes en Tunisie et en Egypte, Moscou a montré une grande crispation, ne cachant pas son regret d’avoir voté, le 17 mars dernier, la résolution 1 973 du Conseil de sécurité autorisant le recours à la force en Libye. Le 4 octobre, un veto russo-chinois a bloqué une première résolution condamnant la Syrie.

« Le virage pris par la Russie est d’autant plus significatif qu’il a manifestement été coordonné avec d’autres membres rétifs du Conseil de sécurité. Jeudi, en effet, les grands pays émergents du Conseil, comme le Brésil, sont montés au créneau pour défendre le projet de résolution russe. Ce texte, qui évoque les violences ‘exercées par toutes les parties’ et élude toute sanction contre Damas, ne fait qu’esquisser une évolution sur le fond. Gérard Araud l’a jugé hier ‘creux’ et ‘déséquilibré’.

« Mettre sur le même pied la violence des forces de l’ordre et celle de l’opposition reste inacceptable pour les capitales occidentales. (…) ».

 

 

Le commentaire de ForumSi :

 

APRÈS LA LIBYE, LA SYRIE ? M. ARAUD, C’EST VOUS QUI ÊTES « CREUX » ET « DÉSÉQUILIBRÉ » !

 

Dans notre commentaire du 26 octobre 2011, consacré à l’assassinat de Mouammar Kadhafi, nous signalions que, sur France inter, Bernard-Henri Lévy avait indiqué que, s’il lui semblait logique que la Syrie fût, après la Libye, le prochain pays sur la liste des interventions à mener par l’OTAN, il lui paraissait néanmoins souhaitable d’attaquer directement l’Iran sans passer par la « case » Syrie, secondaire à ses yeux. Pour M. Lévy, en effet, l’ennemi à abattre avant tout, c’est l’Iran, vraisemblablement parce que celui-ci est considéré comme la menace principale pour Israël et les intérêts de son allié américain dans la région. Et M. Lévy considérerait donc comme tout à fait normal que, après avoir participé très activement à une agression contre la Libye, laquelle ne menaçait nullement les intérêts légitimes de la France et de l’Europe, l’armée française soit lancée, aux côtés des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne, dans une agression contre l’Iran, lequel ne menace pas plus que la Libye les intérêts légitimes de la France et de l’Europe. Agression qui recevrait bien sûr l’aval et l’appui des Etats les plus obscurantistes du monde arabe, l’Arabie séoudite, par exemple, et, surtout, l’inévitable Qatar, de façon à donner à cette agression une certaine légitimité « locale ».

 

Toutefois, le développement d’une insurrection islamiste armée en Syrie redonne toute son actualité au projet d’une agression contre ce pays, selon un scénario qui semble devoir être très proche de celui appliqué en Libye. Tout y est, en effet : le gouvernement syrien qui « tire sur son propre peuple », le bilan des victimes « civiles », qui augmente d’un jour à l’autre d’un millier d’unités supplémentaires, bilan bien entendu communiqué par les « organisations des droits de l’homme », la création d’un nouveau drapeau et d’un « Conseil national syrien », la demande d’une zone d’exclusion aérienne « pour protéger les civils », les « combattants de la liberté » qui, comme en Libye, ne cessent de crier « Alla hou Akbar » en faisant le « V » de la victoire, etc.. Le tout agrémenté des habituelles nouvelles à sensation, celles que l’on nous sert depuis la première agression contre l’Irak : les troupes de Bachar el-Assad sont privées de nourriture, ce qui les pousse à piller les villes sur lesquelles elles sont « lâchées » ; ces mêmes troupes utilisent des « balles explosives pour tirer sur les enfants », etc.. Le détail des « balles explosives » est le détail de trop, celui qui montre que l’on se trouve en face d’une insupportable propagande, analogue à celle qui nous disait, à la veille de la première guerre d’Irak, que les troupes de Saddam Hussein débranchaient les couveuses des maternités du Koweït pour les emporter en Irak !

 

UNE INSUPPORTABLE PROPAGANDE ET D’INAVOUABLES CONNEXIONS SECTAIRES ET COMMUNAUTAIRES

 

Oui, on se trouve bien en face d’une insupportable propagande, assise sur une information à sens unique. Car il est quand même ahurissant que, dans un pays comme la France, dont les médias se vantent de donner une information libre, transparente, démocratique, etc., la seule source d’information concernant la Syrie soir représentées par les organisations dites « des droits de l’homme », alors qu’une information vraiment honnête et complète devrait également faire appel au point de vue du gouvernement syrien. Comment se fait-il, par conséquent, que l’ambassadeur de Syrie en France -une femme, si nos souvenirs sont bons, qui parle un excellent français- n’ait JAMAIS été conviée par « nos » médias à donner le point de vue de l’Etat syrien ?

 

Et comment se fait-il que « nos » gouvernants se complaisent dans un soutien total à une insurrection islamiste soutenue par Al-Qaïda, laquelle s’est manifestée lors des attentats sanglants de fin décembre 2011 à Damas ? Nous expliquera-t-on un jour en quoi il est conforme aux intérêts légitimes de la France et de l’Europe d’appuyer, en Libye, en Syrie ou ailleurs, des insurgés qui se réclament de ce qu’il y a de plus obscurantiste dans le monde arabe et qui entretiennent des liens évidents avec les terroristes tchétchènes, les proxénètes et trafiquants d’armes albanais, ainsi qu’avec les trafiquants de drogue et d’organes humains au pouvoir au Kossovo, soit toute une nébuleuse unie par une référence explicite à certaines dérives -parfaitement rétrogrades et finalement fort peu musulmanes- de l’Islam contemporain, et à la très louche al-Qaïda, une nébuleuse qui, last but not least, représente vraisemblablement la source d’approvisionnement en kalachnikovs du 9-3 et des quartiers Nord de Marseille ? Et en quoi il était et est conforme aux intérêts de la France et de l’Europe d’aider à la chute des régimes laïcs mis en place par le parti Baas, hier en Irak et aujourd’hui en Syrie ? Et en quoi il serait conforme aux intérêts de la France et de l’Europe de s’en prendre demain à l’Iran chiite, qui apparaît pourtant à tout observateur impartial comme mille fois plus intelligent et progressiste que les ridicules féodalités pétrolières qui financent vraisemblablement un terrorisme et des mouvements insurrectionnels se réclamant de l’Islam, alors qu’ils ont très probablement plus à voir avec des dérives mafieuses manipulées par des services secrets qu’avec une quelconque préoccupation religieuse ?

 

Qu’y a-t-il de commun, en effet, entre ce terrorisme insurrectionnel, d’une part, et, d’autre part, les nobles figures d’Ibn Séoud, du roi Fayçal, de Gamal Abdel Nasser ou de Saddam Hussein, mort courageusement son Coran à la main ? Et quoi de commun, aussi, entre ce terrorisme insurrectionnel et le musulman Yasser Arafat qui, quelles qu’aient pu être ses faiblesses, a quand même incarné jusqu’à sa mort la résistance de tout un peuple contre l’oppression et l’injustice ? D’ailleurs, comment se fait-il que d’authentiques organisations de résistance arabe à forte imprégnation musulmane comme le Hezbollah libanais ou le Hamas palestinien se refusent à avoir la moindre relation avec al-Qaïda ?

 

Oui, décidément, il est vraiment difficile de comprendre que « nos » dirigeants et médias veuillent absolument nous faire soutenir le mouvement insurrectionnel à l’œuvre en Syrie, après avoir envoyé nos avions aider celui de Libye : saurons-nous un jour quelles sont les inavouables connexions sectaires et communautaires qui manœuvrent dans l’ombre pour amener notre pays à s’impliquer dans une politique aussi évidemment contraire aux intérêts légitimes de la France et de l’Europe ?

     

L’INITIATIVE RUSSE, L’OPINION DES CAPITALES « OCCIDENTALES » ET LA SCANDALEUSE RÉACTION « FRANÇAISE »

 

Oui, la façon dont est traitée, en France en particulier, l’affaire de Syrie, est proprement scandaleuse et crée un malaise profond, une sensation d’étouffement face à laquelle l’initiative russe à l’ONU est apparue comme une véritable bouffée d’air frais. Le Figaro nous dit que cette initiative a été mal reçue par les capitales « occidentales ». Commençons donc, avant de revenir au projet de résolution russe, par régler son compte à l’insupportable adjectif « occidental ». Nous avons déjà eu l’occasion de signaler que son emploi incessant était une façon de perpétuer le vocabulaire de la Guerre froide, et donc de continuer artificiellement celle-ci, alors qu’elle est bel et bien terminée depuis la chute du Mur de Berlin et la disparition de l’Union soviétique. Si l’on veut y voir clair en politique internationale, il convient donc de bannir cet adjectif du vocabulaire politique, afin de s’éloigner des pièges idéologiques grossiers posés par les néo-conservateurs américains et leurs alliés, ceux de la presse bourgeoise européenne en particulier. Mais alors, quel adjectif utiliser ? S’agissant de l’affaire de Syrie, on pourrait dire que les intérêts qui se manifestent avant tout dans l’hostilité systématique au gouvernement syrien sont ceux d’Israël -la Syrie étant une alliée fidèle de l’Iran et du Hezbollah, adversaires résolus de l’entité sioniste- ainsi que ceux des Etats-Unis, alliés inconditionnels de l’Etat juif. Sur cette base, on pourrait envisager de remplacer « occidental » par « américano-sioniste » ; mais une telle appellation serait incomplète, puisqu’elle ne prendrait pas en compte ces compagnons habituels des Etats-Unis et d’Israël que sont la Grande-Bretagne et -hélas !- la France réintégrée dans les dispositifs militaires de l’Alliance atlantique (De Gaulle, réveille-toi, car avec Sarkozy, la France fait n’importe quoi !). Pour tenir compte du rôle central joué par l’OTAN dans les mécanismes d’alliance et d’agression mis au point par les pays que l’on vient de nommer, il nous semble que la solution la plus satisfaisante est finalement de remplacer « occidental » par « atlantiste », qui est le mieux à même de caractériser ces mécanismes : c’est donc « atlantiste » que nous utiliserons désormais, dès lors qu’il sera question desdits mécanismes.

 

Mais revenons maintenant au projet de résolution russe. Celui-ci évoquait les violences « exercées par les deux parties ». Or, nous dit Le Figaro, « mettre sur le même pied la violence des forces de l’ordre et celle de l’opposition reste inacceptable » pour les capitales atlantistes. Et cela a conduit M. Gérard Araud (notre photo), représentant français au Conseil de sécurité, à juger le projet russe « creux » et « déséquilibré ». Mais comment peut-on porter un tel jugement, alors que ce projet est au contraire un modèle d’équilibre, puisqu’il condamne toutes les violences, d’où qu’elles viennent ? Et comment a-t-on osé le porter, ce jugement, au moment même où le président Medvedev proposait de soutenir l’euro à l’aide des réserves monétaires russes ? La France et l’Europe sont-elles dans une situation si florissante qu’elles puissent se permettre de mépriser une telle aide ? Non, décidément, ce n’est pas le projet russe, mais bien plutôt M. Araud qui est « creux » et « déséquilibré » !                                        

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